Des études génétiques et immunologiques menées chez un patient atteint à l’âge adulte d’une maladie inflammatoire sans précédent ont permis de mieux comprendre le développement de telles affections. Ces résultats ont permis d’initier avec succès une thérapie ciblée chez le patient.
Des chercheurs de Leuven décrivent un nouveau mécanisme dans lequel une mutation génétique provoque l’augmentation d’une autre mutation. L’article vient d’être publié dans le New England Journal of Medicine.
Qu’est ce que sont les maladies auto-inflammatoires?
Les maladies auto-inflammatoires sont des affections complexes dans lesquelles des réactions inflammatoires et de la fièvre surviennent en raison d’une activité excessive de notre système immunitaire. L’inflammation peut survenir spontanément sans facteur déclenchant, d’où le terme d’auto-inflammation. Parfois, l’inflammation est due à des troubles génétiques sous-jacents qui entraînent des symptômes dès l’enfance. On sait très peu de choses sur l’apparition de l’auto-inflammation à l’âge adulte.
Un nouveau mécanisme pour expliquer le phénomène
Des médecins et des chercheurs de Leuven décrivent aujourd’hui un nouveau mécanisme pour expliquer ce phénomène. Des tests génétiques et immunologiques complets effectués sur un patient présentant un tableau clinique inexpliqué ont montré que ce dernier était porteur d’une mutation dans un gène pouvant causer l’auto-inflammation (NLRC4). De manière surprenante, cette mutation n’a pu être trouvée que dans une fraction des cellules et n’est apparue qu’à l’âge adulte. Un examen plus approfondi a montré que les cellules mutées augmentent au fil des années en raison d’une seconde mutation dans le gène TET2. Cette seconde mutation s’est avérée être la cause de l’augmentation du nombre de cellules mutantes.
Ce concept, dans lequel une mutation dite » driver » (TET2) entraîne la propagation d’une autre mutation, dite » passenger » (NLRC4), n’avait jamais été décrit dans ce contexte auparavant. Ces résultats ont permis d’initier avec succès une thérapie ciblée chez les patients. La recherche a été menée par l’équipe multidisciplinaire LeUZis et la KU Leuven.
Ellen De Langhe, rhumatologue à l’UZ Leuven : « Grâce à un examen approfondi, nous avons pu découvrir la cause génétique sous-jacente de la maladie inflammatoire qui affectait notre patiente depuis plusieurs années. Ce nouvel aperçu de son état nous a également permis d’entamer enfin une thérapie ciblée. Nos résultats jettent une lumière nouvelle sur les mécanismes de genèse de ces maladies inflammatoires qui touchent les adultes. Cela a d’importantes implications diagnostiques et, espérons-le, thérapeutiques.
Avant la découverte et le début du traitement, le patient souffrait constamment de maux de tête, de fièvre et de gonflement des articulations, ce qui entraînait des hospitalisations et des congés maladie fréquents, ainsi qu’une mauvaise qualité de vie. Tout cela a complètement disparu après le début de la thérapie ciblée qui a suivi la découverte du mécanisme de la maladie.
C’est une réussite pour le patient et la science ».
Rik Schrijvers, allergologue et immunologiste clinique à l’UZ Leuven : « Il s’agit d’une étude sur une seule personne, que nous ne pouvons évidemment pas encore extrapoler à d’autres patients. Mais c’est la première fois que nous trouvons une explication mécanique à la raison pour laquelle un changement dans un gène, qui peut conduire à une maladie inflammatoire plus tard dans la vie, peut se produire dans un nombre suffisamment important de cellules pour finalement provoquer des symptômes. Cette modification du matériel génétique ne semble pas être le fruit du hasard, mais est allée de pair avec une autre mutation génétique, ce qui nous amène à parler d’un « concept conducteur-passager ».
Eric Legius, généticien à l’UZ Leuven : « Ce travail montre surtout ce que la collaboration interdisciplinaire entre les médecins-chercheurs et les chercheurs fondamentaux de l’UZ et de la KU Leuven peut accomplir, à condition de poser la bonne question et de mener des recherches approfondies. L’étude a été publiée dans le New England Journal of Medicine et nous espérons qu’elle donnera l’impulsion nécessaire à la poursuite de la recherche multidisciplinaire dans ce domaine.”
La cellule LeUZis regroupe l’expertise clinique des maladies inflammatoires au sein de l’UZ Leuven et est le fruit d’une collaboration entre la médecine interne générale, la rhumatologie, la néphrologie, la dermatologie, la pédiatrie, la pneumologie, la neurologie et la génétique humaine.
Article d’origine publié sur le site d’UZ Leuven ici
Lire l’article dans le New England Journal of Medicine ici.